Dans la caste des morts-vivants, mythe étroitement lié à la lycanthropie, le vampire est une créature décrite au fil des siècles comme un être anthropophage, aux multiples facettes et enfant de la Lune. Révélé à l’humanité, le vampire pourrait être l’antithèse de la mort puisque éternel tout en étant rejeté du paradis divin. Dans les arts, ils sont peints aux allures sombres, romantiques toujours sinuant entre les teintes rouges et noires. Mais grande question dans cette Interview, que savons-nous en réalité sur le vampire ? Entrevue autopsie avec Marie d’Ange, une démonologue spécialisée dans les phénomènes paranormaux.
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Origines : Le vampire traditionnel
[perfectpullquote align= »left » bordertop= »false » cite= » » link= » » color= » » class= » » size= » »]« Je n’y suis pour rien puisque c’est mon instinct. Si quelqu’un a mal agi dans l’histoire, c’est Dieu, il n’avait qu’à pas mettre au monde un vampire. » L’éternel – Joann Sfar[/perfectpullquote]
Marie d’Ange : Le vampire existe depuis la nuit des temps mais pas sous l’apparence donné par le mythe folklorique, comme celui de Dracula par exemple. On s’imagine le vampire comme un être buveur de sang, ayant un grand pouvoir d’attraction, pouvant se changer en un animal, ayant une répulsion franche pour l’ail, n’ayant pas de reflet dans le miroir… Or, le vampire est avant un être démoniaque, donc un damné ou une créature démoniaque ou un démon. Dans cette interview je donnerai un point de vue sous l’angle de la démonologie.
Le mythe prend sa source dans la plupart des cultures du monde entier. Le terme anglais « vampir » a largement répandu la légende dans tous les domaines des arts. Autrefois démonisé, les êtres vampiriques n’existaient que dans la pierre, la peinture ou encore certains écrits. Ses origines exactes demeurent obscures, même si le concept de démonisation et d’hémophagie, que ce soit par le sang ou par le souffle vital est extrêmement ancien.
- Europe
Le terme anglais est originellement dérivé du mot français « vampyre », provenant lui-même de l’allemand « vampir », introduit au XVIIIe siècle par la forme serbo-croate « vāmpῑr ». Un autre mythe slave dérivé du vampirisme porte le nom de « Oupyr » (qui signifie en russe « goule »). Dans la série « Hemlock Grove », le Oupyr a les mêmes caractéristiques que le vampire. Quelle est l’étymologie exacte, le sens originel, du mot « vampire » ?
Marie d’Ange : Le vampire est une créature légendaire qui a fait beaucoup parler d’elle depuis les époques très anciennes jusqu’à nos jours. C’est une créature fascinante. Cette créature légendaire tire ses principales caractéristiques des différents folklores et superstitions qui ont traversé les continents. Selon les régions du monde, les pays, les croyances et les cultures, le vampire est décrit d’une manière différente. En règle générale, dans la culture populaire, être un vampire est une malédiction.
La maladie de Günther (La porphyrie érythropoïétique congénitale est une maladie sanguine très complexe et très rare, cette affection étant uniquement héréditaire. Le photodermatie est un symptôme de grande souffrance.) a été décelée pour la première fois en 1911, or Bram Stocker a écrit « Dracula » en 1897, en s’inspirant du mythe de Vlad Tepes qui a vécu entre 1431 et 1476. A quand remonte les premières traces de cette maladie dans l’histoire ?
Marie d’Ange : Deux personnages ont contribué largement au mythe du vampire :
- Vlad Tepes Dracul, dit l’empaleur, prince de Valachie au XVe siècle, membre de l’Ordre du Dragon et chrétien orthodoxe. La légende raconte qu’il aurait empalé plus de 20 000 soldats turcs et qu’il dînait au milieu des morts. C’est ce personnage qui a inspiré Bram Stoker pour son roman « Dracula ».
- Elizabeth Báthory, surnommée la comtesse sanguinaire. Au XVIe siècle, Elizabeth Bathory, une aristocrate hongroise, aurait torturé et tué de nombreuses jeunes filles à son service. On raconte qu’elle se baignait dans leur sang pour rester éternellement jeune. On voit ici cette croyance où le sang humain donne à celui qui le consomme ou qui s’en enduit le corps une éternelle jeunesse. Tout comme le vampire qui boit du sang et qui connaît ainsi l’immortalité.
Ajoutons à ces deux personnages le nom de Delphine Lalaurie. Cette dame est connue pour être une bourgeoise tueuse en série de près d’une centaine d’esclaves noirs au XIXe siècle à la Nouvelle-Orléans en Louisiane. Delphine Lalaurie a commis de nombreuses atrocités, a fait subir les pires tortures à ses esclaves et pensait que se fabriquer des masques avec le sang des esclaves torturés ou boire du sang pouvait lui procurer la jeunesse éternelle. Delphine Lalaurie, après la découverte de ses atrocités par les autorités a mystérieusement disparu. Or, elle fait toujours encore parler d’elle aujourd’hui, puisque l’on dit qu’elle hante toujours sa demeure. Malédiction ? Pacte démoniaque ? On peut se poser la question. La saison 3 de la série American Horror Story met en scène Delphine Lalaurie.
Quant à la maladie, elle devait exister depuis la nuit des temps, mais je ne saurais vous dire à quand remonte sa trace tellement les écrits de l’époque sont remplis de superstitions.
Dans l’œuvre « Diogène » de Vanessa Rousseau, « Nous sommes en possession de deux versions principales bien opposées : la première d’origine juive, qui présente la compagne initiale d’Adam sous les traits de Lilith, une femme aux attributs masculins démoniaques qui est réputée engendrer des monstres, tuer les nouveau-nés ou étouffer in utero les enfants à naître. La seconde, d’origine chrétienne, est la plus connue. Elle présente l’Ève primordiale comme une femme soumise à l’enfantement, qui plus est, à l’enfantement dans la douleur. » Lilith devient l’antithèse d’Eve. Laquelle des deux versions est-elle véridique ?
Marie d’Ange : Les deux versions sont vraies. Au commencement, Dieu a créé Adam et Lilith, la première femme. Or, Lilith ne supportait pas être soumise à Adam et se rebella. Elle devint alors une démone, une dévoreuse d’enfants, la reine des vampires. En s’unissant à Samaël et à Adam, elle donna naissance à de nombreuses créatures démoniaques.
Lilith est une démone qui a été décrite dans pratiquement toutes les civilisations. On la retrouve dans les mythologies sumériennes et babyloniennes, mythe qui a été repris par les civilisations hébraïques. Suivant les différentes croyances, Lilith est tour à tour reine des succubes, reine des Enfers, patronne des sorcières ou des vampires, première femme d’Adam, démone dévoratrice… Lilith représente la femme fatale, l’indépendante et le pouvoir féminin. C’est pourquoi de nombreuses associations des droits de la femme utilisent son image. Lilith est peut-être le plus ancien mythe de la révolte féminine.
Lilith dans les civilisations anciennes :
Les représentations du personnage sont variables et parfois contradictoires selon les cultures. Lilith est parfois chtonienne (appartenant à la Terre), aérienne ou aquatique. Mais en général, elle véhicule une image de femme dévoratrice d’hommes, dotée d’une sexualité dépravée, tout en étant le symbole de la frigidité et de la stérilité.
Chez les Sumériens et les Babyloniens, Lilith est représentée comme une femme ailée, aux pieds se terminant par des griffes, debout sur deux lions se tournant le dos et entourée de chouettes. C’est la Femme-Chouette Divine considérée comme reine des succubes et des Enfers. Elle symbolise la séduction et les plaisirs interdits. Elle fait référence à une créature apportant les esprits du vent et semant la maladie sur Terre.
Dans la civilisation minoenne, de 2700 à 1200 av. J.-C., Lilith était la « déesse aux serpents », superbe et dévoratrice.
Dans l’Égypte ancienne, elle était Isis, la déesse ailée.
Lilith dans la civilisation hébraïque :
Divinité d’origine assyro-Babylonnienne où elle était appelée Lilîtou, Lilith est devenue, dans la démonologie hébraïque, une terrible démone liée à la lune et à la nuit.
Il faut savoir que la civilisation hébraïque va emprunter de nombreux mythes aux Sumériens et aux Babyloniens pour enrichir les écritures divines. On y retrouvera de nombreuses divinités démoniaques et des créatures monstrueuses comme Lamia, les sirènes, les spectres de la nuit…
Entre le VIIIe et le Xe siècle après J.-C., les rabbins vont emprunter le mythe de Lilith aux civilisations anciennes pour expliquer la genèse, c’est-à-dire la création de la Terre et de l’homme. Lilith devient donc la première femme d’Adam. Dieu la créa en même temps qu’Adam avec la même terre d’argile, pour le servir. Mais très vite Lilith se rebelle. Elle veut être considérée comme l’égale d’Adam et ne veut plus être en dessous de lui lorsqu’ils font l’amour. Une violente dispute éclate, Adam la frappe. Elle invoque, alors, le nom de l’Éternel et des ailes lui poussent. Elle part de l’Éden, abandonne Adam. Devant les plaintes d’Adam, Dieu envoie trois anges la récupérer. Mais Lilith ne veut pas revenir et surtout ne veut pas se soumettre à Adam. Devant ce refus, les anges capitulent et passent un marché avec elle. Les anges lui donnent le pouvoir de tuer tous les enfants mâles jusqu’à la circoncision (environ 8 jours) et tous les enfants femelles jusqu’à 20 jours. En contrepartie, elle verra 100 de ses enfants mourir chaque jour et elle devra laisser les enfants vivre s’ils sont protégés par des amulettes au nom des trois anges. Le marché est accepté par les deux parties. C’est depuis ce jour qu’aux Enfers, 100 démons inférieurs meurent tous les jours.
Elle rencontre le démon Samaël ou Adam-Belial et l’épouse. Le couple s’installe dans la vallée de Jehanum (sud de Jérusalem) et aura une multitude d’enfants appelés les Lilins, les Roudins et les Shedims. Rendue stérile par Dieu pour la punir, Lilith pousse Satan à pervertir Ève. Il se déguisera en serpent et possédera charnellement Ève. De cette union naîtra le premier être humain doté d’un nombril, Caïn qui, d’ailleurs, sera le premier homme à commettre un meurtre en tuant son frère Abel.
En démonologie :
Dans la Zohar, qui est un ouvrage majeur de la Kabbale, écrit en araméen entre 1270 et 1280, on trouve deux Lilith :
– La première est appelée Lilith la grande. C’est bien l’épouse de Samaël, qui contrôle 480 légions démoniaques. Elle est la femme de la dépravation. Mais elle a un petit côté sensible et sauve quelques enfants de la mort, notamment le fils d’un roi. C’est pourquoi elle est autorisée à venir sur Terre dès le crépuscule.
– La seconde c’est Lilith la petite, épouse d’Asmodée, prince des ténèbres. Lilith règne sur le royaume des Enfers avec trois autres démones, Igrat, Mahalath et Nahemah.
En démonologie occidentale, Lilith est la reine des Striges, rôle qu’elle partage avec sa sœur Nahema, et la reine des Succubes. C’est une démone dévoratrice d’enfants, manipulatrice, ayant une sexualité illimitée, reine des succubes et vampires, et tueuse d’hommes. C’est elle qui a poussé Satan à s’unir avec Eve, par vengeance pour Adam.
Lilith est une démone qui incite aux plaisirs sexuels, aux plaisirs sensuels. Elle préside à l’acte sexuel, dirige les Incubes et les Succubes, pousse les femmes à une sexualité débridée et leur procure l’orgasme.
Mais Lilith est surtout une tueuse d’enfants en bas-âge, une avorteuse, une infanticide. On la dit aussi une voleuse de sperme en incitant les hommes à se masturber afin de leur ravir leur sperme. Ainsi, elle enfante d’autres démones.
Lilith a le pouvoir d’usurper la place de l’épouse légitime et de provoquer des rêves érotiques. Certains sorciers Wiccans lui retirent ses fonctions destructrices, ce qui est une erreur.
Lorsqu’elle apparaît, elle prend la forme d’une très belle femme aux traits fins, entièrement nue. Son front est orné d’une vulve. Ses jambes sont souvent des serpents. Ses longs cheveux flottent au vent. Elle peut aussi apparaître sous les traites d’une très belle femme aux pieds et aux ailes d’un oiseau rapace et coiffée d’une tiare ou sous la forme d’une femme nue, aguichante, dont le corps se termine par une queue de serpent.
Les Juifs posent des amulettes pour l’empêcher de s’approcher des jeunes enfants et invoquent l’archange Raphaël pour s’en protéger.
Les sorciers invoquent cette démone pour tout ce qui touche à la sexualité.
Ce que représente Lilith :
Lilith serait l’opposé d’Ève, son antithèse. Ève est blonde, aux yeux clairs, au teint pâle, docile et soumise. Au contraire, Lilith est rousse, mate de peau, ses yeux sont noirs. Les deux femmes ont en commun leur grande beauté.
Lilith véhicule une image de démone sexuelle, une femme fatale stérile, tandis qu’Ève est plutôt la femme docile et procréatrice.
Lilith est une femme trompée. C’est pourquoi elle représente les dissensions de couple, les haines familiales et la jalousie.
En psychanalyse, le mythe de Lilith véhicule de nombreux thèmes archaïques. On parlera du combat entre le Bien et le Mal, du fantasme de « dévorement » ou « dévoration » des enfants ou encore de la séduction forcée quasi « addictive » des jeunes hommes. La déesse représente la sexualité, la rivalité, les relations hommes/femmes avec les notions de gynotropisme et de misogynie, les pulsions, la fécondité et la stérilité.
Le vampire au travers des cultures anciennes est décrit comme un démon : le vampire est-il un corps possédé par un démon ?
Marie d’Ange : Le vampire n’est pas un humain possédé par un démon. C’est soit un démon (incube, succube, démon suceur de sang) ou un être maudit. Être un vampire est une malédiction. D’ailleurs, ne doit-il pas vivre caché de la lumière du soleil ? Dans le folklore russe, le vampire est un sorcier mort revenu des enfers et ayant fait un pacte ou une personne qui s’est rebellée contre l’Église orthodoxe, bref un maudit.
Le premier homme ayant reçu cette malédiction serait Judas Iscariote. Judas en trahissant Jésus a été maudit et a été condamné à se cacher de la lumière et à se nourrir de sang humain pour l’éternité. Ce serait dont le premier vampire. Avant lui, les vampires étaient tous des démons.
[perfectpullquote align= »full » bordertop= »false » cite= » » link= » » color= » » class= » » size= » »]« Lilith représente la femme fatale, l’indépendante et le pouvoir féminin. C’est pourquoi de nombreuses associations des droits de la femme utilisent son image. Lilith est peut-être le plus ancien mythe de la révolte féminine. »[/perfectpullquote]
- Asie et Europe
Dans X-Files saison 2, épisode 7, Mulder affirme que la maladie de Günther a nourrit le mythe du vampire et proviendrait d’Asie, pouvez-vous confirmer cette information ? En effet le jiangshi dans le folklore chinois est un cadavre partiellement animé, susceptible de se déplacer par bonds, mû par sa propre énergie ou la magie d’un maître taoïste. Il s’avère souvent dangereux car il peut être tenté de dévorer les vivants ou de se nourrir de leur souffle vital.
L’idée populaire du monstre buveur de sang ou l’énergie vitale des humains est très ancienne et se retrouve dans la plupart des cultures ancestrales. Au proche Orient, on parle du démon Lilith (Démon femelle de la culture mésopotamienne, apportant par le vent des épidémies, s’attaquant aux vivants et en particulier aux nouveaux nés, afin de leur sucer le sang), dans les légendes gréco-romaines on aborde le sujet des empuses (Démon femelle, spectre incarnation d’Hécate, envoyée sur terre pour s’attaquer aux voyageurs), il s’agit de deux versions antiques du vampire. Ces versions correspondent-elles réellement au mythe du vampire ?
Marie d’Ange : Ces versions ont plutôt contribué au mythe du vampire. Les anciennes traditions mythologiques faisaient déjà référence à des créatures mortes-vivantes assoiffées de sang. La plupart du temps, les vampires sont des démons ou des revenants « en corps » par opposition aux revenants immatériels qui visitent les proches pour boire leur sang. Les divinités anciennes buvaient déjà le sang des humains pour se régénérer, à l’image de la déesse Kali qui se nourrissait du sang des offrandes. Même la Bible comporte des références au vampirisme.
Dans la mythologie polonaise, on parle de Latawiec, une créature capable de sucer le sang des femmes qu’elle séduit. Dans la mythologie roumaine, on parle de Nosferatu, un enfant mort-né issu d’un couple illégitime. Dans l’Egypte Antique, le dieu Baal et la divinité aztèque Tezcatli se voyaient offrir, en sacrifice, des jeunes filles et des enfants. Dans l’ancienne Babylonie et en Assyrie, Lilith était une déesse qui se nourrissait du sang des humains pour rester éternellement jeune. Le mythe est repris par la démonologie hébraïque et Lilith devient une démone capable de sucer le sang des nouveau-nés et des hommes qu’elle séduit. Dans la Grèce Antique, on parlait d’Empusa, fille de la déesse Hécate, qui se nourrissait du sang des personnes endormies. Dans la Rome Antique, on parlait de Lamia ou des stryges qui sont devenues par la suite des démones.
Le mythe des vampires s’est construit autour de ces croyances. D’abord, on pensait que les vampires étaient des démons, puis, avec Judas Iscariote, Nosferatu, Vlad… on a pensé que le vampire était un être maudit, d’abord humain puis devenant vampire après une malédiction. Le vampire ne serait-il pas un peu des deux, tantôt un démon, tantôt un humain maudit ?
Processus de métamorphoses : du vampire romantique au vampire moderne
[perfectpullquote align= »left » bordertop= »false » cite= » » link= » » color= » » class= » » size= » »]« Ce matin-là je n’étais pas encore vampire et je vis mon dernier levé de soleil. Je m’en souviens parfaitement et cependant je ne me rappelle aucune aurore avant celle-ci. Je contemplais toute la magnificence de l’aube pour la dernière fois comme si s’eut été la première. Puis je fis mes adieux à la lumière du soleil et me disposais à devenir ce que je suis devenu. » Entretien avec un vampire.[/perfectpullquote]
Des auteurs du XIXe siècle et XXe siècle ont contribué au mythe en rajoutant des caractéristiques qui rendent le vampire romantique facilement reconnaissable. Bram stocker s’inspirant de la légende de Vlad III l’empaleur, a rajouté des éléments, mais Dracula demeure un monstre damné par Dieu. Anne Rice quant à elle a donné ses lettres de noblesse aux vampires, leur accordant, entre autres, le fameux don obscur. Le vampire romantique est un être raffiné dont la première adaptation au cinéma remonte à 1931 avec le film Dracula de Tod Browning. (Notons qu’une version en 1922, Nosferatu le vampire de Friedrich Wilhelm Murnau avait déjà été tournée).
- Le pacte de sang
A l’image d’une fraternité mortelle, l’échange de flux sanguin dans l’histoire, s’apparente au pacte avec le diable. Pratiqué dans le passé, il ne l’est plus depuis la transmission du Sida.
Marie d’Ange : (Le pacte sanguin existe toujours et se pratique lors des messes noires. On n’en parle pas, mais cela existe aujourd’hui cela se multiplie. D’ailleurs, un pacte démoniaque ne peut se réaliser sans le sang).
Le baiser immortel du vampire est cependant bien autre chose, au-delà du symbolisme. La citation « Je t’ai vidé de ton sang jusqu’au seuil de la mort » (Entretien avec un vampire), est le moment où Lestat vide soudainement Louis de tout son sang. Puis vient la phase du choix entre vivre immortel ou mourir mortel, c’est la phase du consentement. Louis consente ; c’est ainsi que Lestat s’ouvre le poignet et lui offre une nouvelle vie. Le sang du vampire est considéré comme une malédiction, une immortalité empoisonnée, comme le fruit défendu dans le Livre de la Genèse.
Marie d’Ange : (Le fruit défendu de la Genèse est l’acte sexuel, avec le mélange des semences. Toutefois, le sang a toujours été considéré comme une offrande, on le voit bien avec les sacrifices d’animaux. Le sang permet aussi de sceller un pacte ou d’appartenir à une église satanique)
- Naissance
« Et maintenant avec tes yeux de vampire, regarde » (Entretien avec un vampire), la vision du vampire semble avoir été transformée, ce qui lui apporte la capacité d’être nyctalope et de voir le monde de l’au-delà. Une telle vision hormis le fait de pouvoir voir dans la pénombre chez certains félins, n’existe pas dans la nature. Où elle n’a pas encore été découverte, chaque année on découvre 16 000 nouvelles espèces, alors pourquoi pas ? Votre avis ?
Marie d’Ange : La capacité d’un vampire de voir dans la nuit et d’être nyctalope est plutôt une capacité surnaturelle, un don démoniaque à cause justement de sa malédiction.
- Transformations animales et autre
Dans Dracula de Francis Ford Coppola, Dracula se transforme en de multiples facettes, en monstre étrange pour séduire Lucie, en fumée pour échapper à Van Hellsing, puis en chauve-souris lorsqu’il est avec Mina. Naturellement cet aspect du vampire n’est pas abordé dans tous les films et romans, à commencer par Anne Rice. D’où vient cet aspect légendaire du vampire ?
Marie d’Ange : En Roumanie, par exemple, on pense que le vampire peut se transformer en loup, car dans ce pays, le loup est considéré comme un passeur d’âmes. En Chine, on pense que le pelage d’un chat peut abriter un vampire. Dans les Balkans, le vampire peut se métamorphoser en papillon.
En fait, le vampire étant un être damné, un maudit, il a le pouvoir de se transformer en animal. Il faut savoir que la plupart des démons ont l’apparence d’une bête, mais peuvent aussi se montrer sous l’apparence d’un homme ou d’une femme. Ici, c’est le contraire, le vampire a une apparence humaine, mais peut se montrer sous la forme d’un animal.
Les liens du sang
- Immortalité partielle
Connaissez bien la légende de Vlad Tepes qui aurait soi-disant bu le sang du Christ et serait devenu immortel ? (Scène du Film « Dracula » de Francis Ford Coppola). Si oui pensez que Bram Stocker a respecté le mythe ?
Marie d’Ange : D’après la légende Vlad Tepes aurait bu le sang du Christ et serait devenu un vampire, le comte Dracula. Un mythe est toujours tiré d’un fait réel qui est transformé par la suite par ceux qui le racontent. Ainsi, certains, au coin du feu, ont raconté que Vlad avait bu du sang du Christ. Or, d’après l’histoire, Vlad était un meurtrier sanguinaire. Bram Stocker a respecté le mythe, mais pas l’histoire vraie de ce personnage.
Je pense que cette histoire de sang du Christ proviendrait de Judas Iscariote qui s’est vu offrir une coupe de sang par Satan après son suicide. Satan aurait pris ce sang du Christ sur la croix et l’aurait offert à Judas pour le maudire. Étant donné que Judas s’est suicidé, Satan l’aurait récupéré en enfer. En faisant cela, il se révoltait contre sa défaite et montrait qu’il avait encore les capacités de se battre, malgré sa défaite sur Jésus. On sait que Jésus a battu Satan sur la croix et que ce dernier mène un combat qu’il sait perdu d’avance. Les deux mythes ont été ainsi mélangés.
La comtesse Élizabeth Bathory a vécu entre 1560 et 1614, et a assassiné des jeunes femmes en prenant des bains de sang dans l’idée de conserver sa jeunesse. D’où vient cette obsession que l’hémophagie rend immortel ?
Marie d’Ange : De la nuit des temps ! Lilith buvait du sang pour rester jeune, Lamia en faisant tout autant et ainsi de suite. De nombreuses divinités se voyaient offrir des sacrifices de sang.
Le sang est le liquide vital qui coule dans les veines de chaque individu. Sans le sang, il n’y a pas de vie. L’enfant dans le ventre de sa mère est nourri par le sang. C’est ce qui lui permet de se développer. Peut-être que la croyance vient de ce fait.
- Hémophagie
Les prêtres des Mochicas du Pérou (200 av. J.-C. à 700 après J.-C. environ) pratiquent des sacrifices humains : ils égorgent les victimes, collectent leur sang dans des bols et le boivent. Quelle est la portée culturelle de l’hémophagie à travers l’histoire ? Où l’hémophagie a-t-elle commencée ?
Marie d’Ange : L’homme a toujours fait des sacrifices humains, souvent pour des divinités qu’ils vénéraient. La Bible est remplie de passages comportant des sacrifices humains.
Dieu n’a-t-il pas lui-même demandé un sacrifice de sang à Abraham. Ce passage biblique heurte souvent les lecteurs, car il est violent. Dieu met Abraham à l’épreuve et lui demande de sacrifier son fils Isaac. Le scénario du sacrifice est en place, Abraham va sacrifier Isaac, mais au même moment, un ange du Seigneur l’arrête.
Jésus lui-même ne s’est-il pas sacrifié, n’a-t-il pas donné son sang en rémission des péchés ?
Le sang humain agit ici comme une offrande, pour demander le pardon ou pour montrer sa dévotion à une divinité. On sacrifiait des enfants à la divinité Baal et à bien d’autres. Jésus sur la croix est, pour les chrétiens, le dernier sacrifice humain et même animal, puisque les chrétiens sont interdits d’offrir du sang.
En sorcellerie noire, dans les messes noires, du sang (souvent d’un animal, parfois d’un être humain) est offert au démon. Les pactes sataniques se concluent toujours avec le sang.
[perfectpullquote align= »full » bordertop= »false » cite= » » link= » » color= » » class= » » size= » »]« Le sang est le liquide vital qui coule dans les veines de chaque individu. Sans le sang, il n’y a pas de vie. L’enfant dans le ventre de sa mère est nourri par le sang. C’est ce qui lui permet de se développer. Peut-être que la croyance vient de ce fait. »[/perfectpullquote]
Besoins physiologiques
- L’enterrement
Dans Dracula de Francis Ford Coppola, Dracula doit reposer dans la terre de sa patrie pour régénérer son pouvoir. Cet aspect n’est-il commode qu’à Dracula, où à tous les vampires ?
Marie d’Ange : La croyance qui veut qu’un vampire ne peut se régénérer que dans la terre de sa patrie est une croyance propre au mythe de Dracula. En général, les vampires dorment dans des cercueils la nuit, de préférence dans un cimetière (c’est son territoire). Il n’a pas besoin d’être sur les terres qui l’ont vu naître humain pour se régénérer. C’est le sang qu’il boit qui le régénère, qui le nourrit.
- Carnivore
Parfois en manque de sang, ou dans un état affaiblit, le vampire suce le sang des animaux afin de survivre. Ce qui est le cas pour Louis, dans Entretien avec un vampire mais lui le fait par désespoir. D’abord des oiseaux, des caniches puis des rats. Même Lestat lui utilise ce procédé après avoir bu du sang de mort et avoir été égorgé par Claudia, il se nourrit de toute la vie putride du Mississippi. Cela n’est pas courant dans tous les films du vampire romantique, alors cela correspond-t-il au mythe ou est-ce une invention d’Anne Rice ?
Marie d’Ange : Anne Rice s’est servie d’une croyance populaire qui dit que le vampire peut aussi se nourrir de chairs en décomposition et d’excréments humains. Dans ce même folklore populaire, on retrouve le fait que le vampire, dans son cercueil, mastique les linges enterrés avec lui ou pratique l’auto mastication, c’est-à-dire qu’il mâche sa propre chair.
Certains auteurs ont repris ces croyances, les ont modifiées, et le vampire devient un être capable de se nourrir du sang d’un animal. Certains vampires se constituent même une banque de sang, récolté dans des fioles. Le vampire retire, alors, quelques centilitres de sang à un individu, à l’aide d’une aiguille et conserve ce sang. L’individu ne meurt pas, n’est pas contaminé.
Vulnérabilités
- Religions, en particulier la foi catholique
La foi catholique a une histoire tâchée de sang, depuis le départ de la mort du Christ. Un croyant qui a la foi, sera aveuglé et dirigé vers une « hauteur divine », sous la protection de Dieu, du moins c’est ce qu’il croit, il ira en croisade contre le mal encore et encore jusqu’à son dernier souffle. Cette dévotion jadis répandue, donnait à l’église et à tous ses symboles une certaine puissance « divine ». Toutes les idoles et objets rituels devenaient alors eux-mêmes porteurs de cette foi. Mais de nos jours, crucifix et eau bénite n’auraient pu aucun pouvoir puisque les mœurs sociales ont évolué, Karl Marx a dit « La Religion est l’opium du peuple », et Nietzsche, « Dieu est mort ». Les vampires craindraient-ils encore aujourd’hui les reliques de l’Église ?
Marie d’Ange : La foi a toujours sa puissance divine. La vraie foi, c’est de croire en un Dieu et de faire le bien sur Terre pour atteindre le paradis. Aujourd’hui, on veut la mort de l’Église, en lui reprochant en autre son histoire tâchée de sang, ses croisades. Le Diable est entré dans l’Église, il agit de l’intérieur. Mais, la religion catholique a fait plein de belles choses, on n’en parle jamais.
Concernant le fait que le vampire craint ou pas les reliques de l’Église, je pense que oui. Étant un damné ou un démon, il doit les craindre. Comme il doit craindre l’homme ou la femme de foi qui se dresse devant lui.
Prenons l’exemple d’un exorcisme (rituel qui permet de chasser un démon du corps d’une victime). Si celui qui réalise l’exorcisme n’a pas la foi, il ne réussira pas à libérer la victime. Comme Jésus l’a dit : « quiconque croit en moi et invoque mon nom pourra repousser le démon devant lui ». Pour le vampire, c’est pareil.
- Le feu
Le feu a dans sa symbolique, un côté sacré et purificateur. Dans la mythologie grecque, le feu de l’Olympe est donné aux Hommes par Prométhée, qui vola ce savoir divin à Zeus. Zeus l’enchaîna à un rocher jusqu’à ce qu’un aigle vienne dévorer son foie le jour, qui repoussait la nuit et ensuite de suite. Au Moyen Age, le feu était surtout utilisé pour brûler les « sorcières » et ainsi purifier leurs âmes. Depuis toujours, tous les animaux craignent le feu, et les Hommes n’y échappent pas. Le Feu consume tous ses flammes. Dans le film « Entretien avec un vampire », Louis et Claudia immolent Lestat, qui parvient à survivre en s’enterrant dans le sol. En effet ce dernier a certains pouvoirs depuis qu’il a bu le sang d’Akasha, dans le roman « La Reine des damnés ». C’est cette partie de puissance héritée qui permet à Lestat de s’en sortir avant de se terrer dans le silence durant plusieurs siècles car le feu a tout même entamé son épiderme. Peut – on y voir la symbolique qu’un vampire brûlé est purifié ? Une fois prit dans un brasier, le vampire devient-il cendré comme face aux rayons du soleil ?
Marie d’Ange : Le feu est vu comme un moyen de purifier une âme damnée. Mais qu’est-ce qui est plus fort que le feu ? L’eau ! L’eau peut éteindre le feu, c’est pour cela que l’eau bénite est plus dévastatrice que le feu sur un vampire. Un vampire craint la lumière du soleil, car cette lumière le brûle. Mais, quelques gouttes de sang pourront le régénérer. Ce qui n’est pas le cas avec l’eau bénite, puisque l’eau bénite le purifiera de l’intérieur.
En même temps, il faut bien comprendre que si l’on a affaire à un démon vampire, le feu n’aura aucune atteinte sur lui. Si l’on a affaire à un damné, là encore, le feu brûlera son corps, mais ne détruira pas le vampire.
- Les miroirs
Il est connu chez les personnes superstitieuses que le miroir est le reflet de l’âme, peut-on dire que le vampire n’a pas d’âme ?
Marie d’Ange : Dans certaines croyances, le vampire ne se reflète pas dans un miroir et c’est ainsi que l’on peut le confondre. Or, si le vampire est un démon, alors oui, il n’a pas d’âme. Si c’est un damné, alors son âme appartient à un démon. Ce n’est pas que le vampire n’a pas d’âme, c’est qu’il n’a plus d’âme, il la soit donné par un pacte à un démon, soit l’a perdu avec la malédiction qui s’est abattu sur lui. Mais l’âme est toujours quelque part, prisonnière.
- Les rayons du soleil
Les vampires sont-ils sensibles à la lumière artificielle ?
Marie d’Ange : Les vampires ne sont pas sensibles à la lumière artificielle. Seule la lumière naturelle, celle du soleil, peut les brûler.
- Le pieu dans le cœur et la décapitation
Dans Dracula de Francis Ford Coppola, Lucie a été vampirisée par Dracula lui-même, après quoi, la troupe de Van Hellsing se rendent dans sa tombe afin de mettre un terme à la malédiction. Ils lui enfoncent d’abord un pieu dans le cœur (même si celui-ci ne bat plus) et lui coupe la tête. Est-ce Bram Stocker qui a introduit cette notion dans le roman ?
Marie d’Ange : Cette façon de faire pour tuer un vampire existait bien avant la sortie du roman. On pratiquait déjà la décapitation dans les pays slaves, surtout en Allemagne, au XIVe siècle. Dès que l’on avait un doute concernant un mort, que l’on pensait que ce dernier pouvait se relever la nui pour attaquer les vivants, on lui coupait la tête et on la plaçait entre ses jambes.
Au Moyen-Age, en Europe, on coupait les tendons des genoux du mort pour l’empêcher de se lever la nuit.
Il a aussi été rapporté d’autres croyances plus anciennes, comme ce rituel consistant à clouer la tête, le corps ou les vêtements du cadavre pour l’empêcher de se relever la nuit. Les gitans pensaient que leur transpercer le cœur avec une barre en métal et placer dans les yeux, les oreilles et entre les doigts des morceaux de fer ou d’aubépines était la meilleure méthode pour empêcher un mort de devenir un vampire.
Bram Stocker, pour son roman, s’est inspiré d’une croyance roumaine. En effet, en Roumanie, au XVe, on pratiquait le rituel de « la grande réparation », rituel qui consistait à planter un pieu dans le cœur du vampire, en une seule fois, faute de quoi le vampire pouvait ressusciter. Ce rituel se pratiquait aux premières lueurs de l’aube.
- Invitation dans une maison
La moindre des vulnérabilités, peu utilisée au cinéma sinon dans la série burlesque pour adolescents, Buffy contre les vampires. Que se passe-t-il si un panneau indique : « bienvenue à toi » ? le vampire peut-il rentrer ?
Marie d’Ange : Le vampire, étant un damné ou un démon, n’a pas besoin de votre accord pour entrer chez vous. Il n’a pas besoin non plus de votre accord pour vous vider de votre sang. Le démon ou le damné est un être libre.
Pouvoirs
- Regard hypnotique et charme sensuel
En physique, « lorsque deux pôles magnétiques opposés s’attirent, l’un des deux aimants favorise l’alignement parallèle des aimants élémentaires de l’autre aimant. Ceci augmente légèrement la puissance des deux aimants. » On peut appliquer aussi bien ce concept dans l’attraction interpersonnelle qui, cependant est différente dans son application car ici l’attraction doit être réciproque. Mais imaginons un instant que les deux pôles opposés, mortel et immortel, s’attirent et que le vampire soit le pôle qui soit à la source de ce pouvoir en favorisant l’émission des ondes vibratoires grâce à son charme et à son regard, il pourrait sans peine agir comme un aimant qui attire son naturel opposé, la victime mortelle. Ce phénomène deviendrait alors une interaction réciproque dans son champ magnétique. Peut-on dire que le vampire a un cerveau sur-développé et que celui-ci génère un magnétisme élevé ou doit-on parler de pouvoir hypnotique ?
Marie d’Ange : Je pense que le vampire a plutôt un pouvoir hypnotique qui lui vient de sa condition, soit de démon, soit d’être damné. C’est un pouvoir démoniaque qui lui permet de mieux maîtriser sa victime.
Par un pacte de sang, un rituel de magie noir, un homme qui fait appel à un démon, un sorcier quoi, peut aussi obtenir ce pouvoir hypnotique et ainsi asservir d’autres hommes ou hypnotiser une foule entière.
- Le don obscur
Dans Entretien avec un vampire, à un passage du film, il avoue à Louis « le don obscur diffère en chacun de nous ». Pour Lestat, il est capable de se régénérer instantanément ou encore de lire dans les pensées. Pour Louis, il se déplace à une très grande vitesse ainsi de suite. Le don obscur a-t-il été inventé par Anne Rice, ou est-ce plus ancien ?
Marie d’Ange : En fait, si l’on prend en compte que le vampire est un démon et que chaque démon possède ses propres capacités, alors chaque vampire a ses propres capacités. De même, si le vampire est un être damné, s’il a reçu une malédiction, alors ses capacités viendront de la malédiction reçue et de ses propres capacités lorsqu’il était encore humain.
- Age
Dans Underworld, les trois anciens, Marcus le premier vampire, Amélia et Kraven, sont conservés dans des cercueils, hibernant un par un, chacun leur tour, le tout dans une salle sécurisée et bien gardée. Plus un vampire est ancien, plus il sera puissant. Dans les romans d’Anne Rice, les plus anciens vampires perdent souvent toute humanité, toute compassion. Dans Entretien avec vampire, une autre citation : « le monde change mais nous ne changeons pas. C’est là qu’est toute l’ironie qui finit par nous tuer ». Si l’immortalité humaine existait, on en arriverait-on à ce résultat ?
Marie d’Ange : Qui dit immortalité, dit inconsciemment ne plus avoir de but dans la vie. Un homme normal immortel prendra ce don au début comme une bénédiction. Mais, il verra tous ses proches mourir autour de lui un par un, il sera seul, et surtout, il n’aura plus aucun but. Il aura tout vu, tout vécu, quoi faire d’autre lorsqu’on est seul, lorsque ses proches sont morts, lorsqu’on erre sans but ? Alors l’immortalité devient une malédiction. Cet homme immortel verra le monde changer, mais lui sera un paria dans ce monde, il devra se cacher ou changer d’identité souvent, ne pourra pas se faire d’amis ou tomber amoureux de peur de les voir mourir. Je pense que cela doit être dur à vivre.
Dans une vie « normal », on naît, on grandit, on apprend, on fait des erreurs, on se fait des amis, on fonde une famille, on travaille, on se construit une vie. On a un but, on avance, que cela soit professionnellement ou personnellement. Une fois devenu vieux, on regarde derrière soi et on fait le bilan. Qu’a-t-on accompli ? On regarde nos enfants grandir, on leur donne les outils pour qu’eux aussi se créent une belle vie. Mais si l’on est immortel, l’on a plus tout cela, ce souffle qui nous aide à avancer malgré les ennuis, la maladie, les accidents. Et surtout, on a plus l’amour de ses proches pour nous aider à avancer.
Vie sociale du vampire : vers le vampire moderne
[perfectpullquote align= »left » bordertop= »false » cite= » » link= » » color= » » class= » » size= » »]« C’est une tare génétique on pourrait dire une anémie hémolytique. C’est pour ça qu’on doit essayer de traiter le problème par la génétique. Il faut programmer l’ADN des victimes avec le rétrovirus, c’est comme ça qu’on traite l’anémie cellulaire. » Blade[/perfectpullquote]
- Les Clans
Dans Vampire la mascarade, selon la version la plus répandue de l’histoire de la Famille, la race des vampires est issue du vampire primordial, Caïn. Banni dans le pays de Nod après avoir tué son frère Abel, Caïn a été maudit par Dieu et devint ainsi le premier vampire. Peu après, Caïn donna naissance à trois enfants, qui engendrèrent à leur tour treize vampires. Les vampires appelés Antédiluviens (puisqu’ils sont nés avant le Déluge), est censée avoir donné naissance à ce qu’on appelle aujourd’hui les clans. Un vampire selon le mythe, vit-il seul ou en communauté ?
Marie d’Ange : Cette histoire de Caïn et Abel n’est qu’une pure invention, un mythe. Le premier vampire, d’après la croyance, est Judas Iscariote. Caïn, selon la Bible, est le premier homme à commettre un meurtre et donc à être condamné à souffrir toute sa vie. Caïn est celui, qui épris de jalousie envers son frère et tenté par le diable, a commis l’irréparable.
Le vampire est un être solitaire et pour combler cette solitude, certains se réunissent en clan. Ainsi, ils se protègent les uns des autres.
- Les sang-purs et ceux qui ont subi une mutation
Dans Blade, il existe deux catégories de vampires, ceux qui sont né vampires et ceux qui ont étés mordu durant leur vie mortelle. Selon le mythe, un vampire peut-il naître en tant que tel ?
Marie d’Ange : Personne ne naît vampire, même si dans le mythe de Nosferatu on le suppose. On devient vampire parce que l’on reçoit la malédiction, soit en la demandant par un pacte (donc en se damnant), soit parce que l’on est infecté par un autre vampire. A savoir que le vampire est stérile, il ne peut enfanter. Seuls les démons peuvent enfanter des vampires.
[perfectpullquote align= »full » bordertop= »false » cite= » » link= » » color= » » class= » » size= » »]« Aujourd’hui, dans notre monde cartésien, l’on ne croit plus en rien. Même devant un miracle, l’homme a du mal à y croire. Alors pensez-vous s’il se retrouve devant une créature démoniaque ! Il serait certainement pris de panique, et rejettera en bloc ce qu’il aura vu. C’est parce que notre monde est cartésien, que l’homme n’a plus la capacité de lutter contre ce genre de manifestations. »[/perfectpullquote]
- Organisations
Dans Blade, les sangs purs sont une assemblée infiltrée dans tous les domaines de la société humaine, la médecine, les forces de police, les banques, etc. Ces organisations existent-elles dans le but d’avoir le pouvoir ou bien de passer inaperçu ?
Marie d’Ange : Il existe en effet des organisations démoniaques infiltrées partout et répandant la parole de Satan. Ces organisations ont tout intérêt à ne pas se faire connaître, mais cela commence à se voir. On parle aujourd’hui des illumaniti, des francs-maçons… Mais je ne pense pas que les vampires soient impliqués dans ces organisations.
- Si un vampire devait se montrer au grand jour
Dans la Reine des damées, Lestat se montre devant les médias du monde entier en jouant dans un groupe de rock. Les autres vampires désapprouvant cela, s’attaquent en public à Lestat. Face à l’inconnu ou à l’incompris, l’être humain fait preuve de rejet. Or ici, la foule ne serait-elle pas plutôt prise de panique ?
Marie d’Ange : Aujourd’hui, dans notre monde cartésien, l’on ne croit plus en rien. Même devant un miracle, l’homme a du mal à y croire. Alors pensez-vous s’il se retrouve devant une créature démoniaque ! Il serait certainement pris de panique, et rejettera en bloc ce qu’il aura vu. C’est parce que notre monde est cartésien, que l’homme n’a plus la capacité de lutter contre ce genre de manifestations.
- Les vampires torturés
Dans Entretien avec un vampire, Arman révèle à Louis « Sais-tu combien peu de vampires ont la force d’assumer leur immortalité, combien d’entre eux se donnent volontairement la mort ». Louis, vampire torturé dit à un moment du film « Notre place est en enfer ». Si l’immortalité est un fléau, se nourrir de sang humain est un autre. Louis en particulier supporte très mal sa condition. Un vampire pourrait-il en arriver là ?
Marie d’Ange : Le vampire, en tant qu’être damné, a été un humain. Il garde un bout de sa conscience humaine, ce qui fait que certains de supportent pas de tuer d’autres personnes pour se nourrir, ou certains ne supportent pas d’avoir vu mourir ses proches. C’est pourquoi l’on dit que les vampires sont des êtres malheureux, solitaires et que certains demandent la mort.
- Hybridation
Dans Underworld, Michael Corvin est le descendant mortel de Alexander Corvinus. Son sang est la clé car il permet l’hybridation entre vampire et lycans. Mordu par Lucian, il sera ensuite étreint par Selene. Kraven y voit une abomination et décide de l’affronter. Or, rapidement, l’hybride se montre plus rapide que son adversaire. L’hybridation des deux espèces est-elle possible ?
Marie d’Ange : Cela ne s’est pas encore vu.
- Reproduction des vampires
Dans Underworld, le soulèvent des lycans, Lucian et Sonja sont amoureux fou l’un de l’autre. De leur union, Sonja avoue à Kraven, son père, qu’elle porte en elle un enfant. Un vampire peut -il se reproduire ?
Marie d’Ange : Un vampire en tant que damné est stérile. Il ne peut concevoir un enfant.
J’ai répondu aux questions auxquelles je pouvais répondre. Lorsque vous parlez des films tels que Underworld par exemple, je ne peux y répondre, car c’est de la fiction. Bien sûr, beaucoup de films se servent des mythes, mais après il y a trop de fiction, comme des sérums. D’un point de vue de la démonologie, le vampire en tant qu’être damné ne peut être sauvé sauf s’il le demande par un exorcisme. Cela est la seule possibilité d’enlever la malédiction qui pèse sur lui. Alors, il retrouvera son âme, mais sera mort, puisque plus immortel. Dans le cas des démons, il n’y aucun sérum, sauf la foi.
Merci à vous Marie d’Ange pour cette interview.
Conclusion entre ses crocs
Le monde des vampires appartient à la nuit, inspirant à toute époque des milliers d’artistes. Un intemporalité est finalement une forme d’éternité en soi : voici d’une certaine façon, la preuve attestée de l’immortalité de ces créatures. En vue de la publication de cette entrevue, nous avons organisé notre première exposition virtuelle, qui est visible dans la partie « Musée Rouge » du site. De plus, nous complèterons cette autopsie avec un dossier sur les possibles explications scientifiques des vampires.
Références de l’interview
Médecine et Histoire
- CFP-CRMR le centre français des porphyrie
- Psychoweb – Vampirisme clinique et syndrome de Renfield, caractéristiques psychopathologiques
- PC- métabolisme rare du calcium et du Phosphore
- Cannibalisme, Anthropophagie, nécrophagie, Hémophagie, vampirisme
Mythe et paranormal
Ouvrages
- Dracula, Bram Stocker, 1897
- Entretien avec un vampires, Anne Rice, 1976
- Diogène de Vanessa Rousseau, 2004
Films et séries
- Dracula de Francis Ford Coppola, 1992
- Dracula de Tod Browning, 1931
- Nosferatu de Friedrich Wilhelm Murnau, 1922
- Entretien avec un vampire de Neil Jordan, 1994
- La Reine des damnés de Michael Rymer, 2002
- Blade de Stephen Norrington, 1998
- Underworld de Len Wiseman, 2003
- Buffy contre les vampires de Joss Whedon, de1997 à 2003
- X-Files de Chris Carter, de 1993 à 2002
- Hemlock Grove d’Eli Roth, de 2013 à 2015
- American Horror Story (saison 3), réalisé par Ryan Murphy et Brad Falchuk